vendredi 30 janvier 2009

Faire une scène à l'artiste

La fin des allumettes

Hier, je suis allée voir un ami chanter. Nous étions convoqués à 20 h 30 il a commencé à 22 h 15. Je suis partie à 23 h. Pourquoi ?...

Nous sommes en face d’un interprète immense. Les plus beaux textes de la chanson francophone sont diffusés par une voix adaptée, une diction modulée, un doigté de guitare sensible et sûr.

Arrivé très en avance dans le petit cabaret, l’artiste faisait le tour des tables, distribuant accolades et plaisanteries : parents et amis se réjouissaient. Des jeunes aussi. Il commença son spectacle en disant combien il était heureux de se trouver ici… On avait hâte de l’entendre chanter.

Mille chansons ouvrait le bal comme d’habitude. On laissera le bénéfice du doute : il aurait dû s’échauffer avant. Une chanson de Gilles Vigneault, abondamment commentée, fut exécutée par une voix de tête, très différente de la voix naturelle de l’interprète. Un peu de morale au sujet des homosexuels, et c’est Aznavour qui se fait massacrer par des blancs de mémoire sous formes de silences souriants et strophes sautées, après trois reprises.

De la mémoire, mon ami en a tout une : il connaît un nombre incalculable de textes, ainsi que leurs contextes. C’est un être passionnant - lorsqu’il est sobre…

Nous sommes en face d’un artiste vieillissant. Beaucoup vous ont un charme !...D’autres se croient permis de relâchement. C’est, je crois, la différence entre un vrai professionnel et un bourlingueur. Comment peut-on jeter aux orties un don de Dieu ? (je ne crois pas vraiment en Dieu avec toutes les saletés qu’il laisse se produire dans le monde, mais cela fait joli d’appeler cela ainsi : un don de Dieu).

Les ingrédients du succès (nul besoin qu’il soit planétaire) se résument en TTT : talent, travail; ténacité. Quand un artiste cumule plusieurs dizaines d’années de travail, que son talent est intact, qu’il a la chance de pouvoir durer grâce au répertoire qu’il porte, comment se fait-il qu’il se mutile ? J’oublie un quatrième T : Tenue sur scène. Nous avions ce soir-là un public de tous âges, dont une grande partie était acquis d’avance. Deux journalistes dans la salle. Et aussi quelques représentants d’une obédience qui peut beaucoup pour ses membres, ainsi que d’anciens camarades de classe long-time-no-see bien installés dans la vie. Pourquoi un tel gâchis, quand on sait que la suite dépend toujours de quelqu’un dans la salle ?

Quel manque de respect pour des gens –certains très jeunes- qui ont payé 10 $ l’entrée plus une, ou deux ou trois consommations c'est-à-dire une dépense de 100 $ pour un couple ! Et même si cela avait été gratuit, un artiste ne se doit-il pas à son public ?

S’il n’y avait eu que deux jeunes dans la salle qui auraient pu - ce soir-là - découvrir ce que notre culture véhicule de plus beau : Brel, Brassens, Ferret, Duteil, La langue de chez nous. C’est sur cette chanson-là que nous nous étions rencontrés, mon ami chanteur et moi. Hier, je suis partie avant, afin de préserver le souvenir et aussi parce que je déteste voir un ami se dégrader par sa propre volonté. Le suicide en direct, ce n’est pas ma tasse de T et si j’ai envie d’aider quelqu’un, il faut qu’il ait le goût de se relever. Si j’avais un conseil à donner à mon pote, ce serait d’éviter les cabarets, de bannir les soirées, ce n’est plus fait pour lui - la nuit - car il a craqué ses dernières allumettes.
P.S.
Je ne vous donnerai pas le nom de l’artiste - c’est un ami – et pourquoi l’accabler : il n’est pas le seul dans son cas…

lundi 26 janvier 2009

Écho de la salle des profs…


« Hier, j’suis t’allé…. »
Oui je sais, mais quand je parle, je me détends – Évidemment lorsque je suis devant les élèves, je surveille mes liaisons. Et puis j’ai bien le droit de joualer un peu… »


Pardon, monsieur, ce n’est pas du joual ça, et je ne vois pas en quoi le fait d’introduire sciemment des fautes de français peut constituer une détente. Que vous lâchiez des gros mots pour vous détendre, passe à la rigueur, si vous vous êtes pris le doigt dans la porte, mais bafouer l’orthographe du verbe, c’est vicieux tout de même. Rien ne garantit qu’un jour vous n’écrirez pas je suit allé. Si je vous faisais un procès d’intention, je dirais que vous avez honte, même devant vos collègues, de votre érudition. Vous souhaitez vous fondre dans la masse, dont vous avez de toute évidence une piètre opinion puisque vous vous abaissez au niveau que vous lui prêtez. L’effort linguistique que vous prétendez fournir en classe est-il si insurmontable que vous vous sentiez obligé de vous détendre ? Comment peut-on être sûr que ce relâchement ne vous prenne pas de temps à autre en présence de vos élèves ? « Attention à vos enfants, c’est peut-être le nôtre ! ».

mardi 20 janvier 2009

L’art et le procédé


Vendre son art, pour un artiste est un art délicat, délictueux parfois…
Certains artistes autoproclamés ne vendent pas de l’art, mais un procédé.

La différence se situe au niveau de l’expression et donc de l’intention :
  • Veut-on exprimer son moi le plus profond, sa vision du monde, son désarroi ou son enchantement ?
  • Est-ce là une nécessité vitale, un mode de vie et de communication, un langage ?
  • Veut-on devenir riche et célèbre, voire célèbre et pas riche ou riche incognito ?
  • Il s’agit alors de mettre en marché la poudre aux yeux pour non initiés. La culture artistique est si peu développée, qu’il est très facile de fourguer n’importe quoi à n’importe qui, pourvu que l’on ait pignon sur rue – donc déjà beaucoup d’argent à investir dans le pignon. Ainsi fleurissent les galeristes vendeurs de procédés – souvent galeries d’un seul artiste qui vend sa merde à des ignares. Dis-moi qui tu aimes et je te dirai qui tu es; cela vaut pour tes goûts en art visuel autant qu’en musique, en littérature, en théâtre…bref en art. Cependant, on s’identifie plus aisément à un niveau culturel en musique, c’est moins évident en art visuel. Le procédé donc, est une technique facilement identifiable, une expression si répétitive qu’elle ne peut provenir d’une intention intègre. Au diable le dessin, la charte des couleurs, le souci de la conservation de l’œuvre. Tout cela nécessite de fastidieuses études. Passons directement au cash.
Le MacDo de l’art n’est en aucun cas de la gastronomie.

lundi 19 janvier 2009

Cloaca V - Après la banane, l'étron !


Ah ben, j’ai mon voyage !... Après la banane*, l’étron !
L’art contemporain : séduisant, plaisant, agréable, réconfortant…dit-on. Ah oui ?!?!
Annie Depont
Dans « art contemporain » ce qui m’interpelle c’est le mot « contemporain », ce qui me gêne c’est le mot « art ». Je peux choisir de me laisser ou non interpeller, mais je m’insurge à laisser le mot art ou artiste fréquenter n’importe quoi ou n’importe qui.

Je ne m’imagine pas du tout emmener mes petits-enfants voir une machine qui fait caca** ni les encourager plus tard à fréquenter une telle université, qui oublie de mettre ses priorités au bon endroit. Il paraît que cela fait rire… pipi caca : c’est à la maternelle que cela fait rire !

L’UQAM dans la merde ?...Pas tant que cela, semble-t-il, car une telle exposition ne coûte pas trois sous, mais on nous rassure : le projet avait été ficelé AVANT donc cela ne compte pas !

L’art est-il constipé ?... "Comment se fait-il que cela ait pris tant de temps ? "demande la présentatrice de Radio Canada. C’est vrai, Montréal n’attendait que ça : sortir de la marde blanche pour en admirer une autre, plus vraie que nature, on se sent enfin soulagé ! Non, ici l’art n’est pas constipé : il faut que la machine produise, sinon il n’y aura plus d’exposition et l’on nous analyse la matière finement : « comme la machine ne connaît pas de stress, elle ne peut être constipée, ni indisposée, nous obtenons une matière fécale idéale et constante.» - Odorante ? demande l’un - Oui ! répond l’autre.

On parle d’une « matière fécale objective »…Deux repas (équilibrés !) par jour, parfois préparés par les plus grands chefs, notamment à Lyon, en France (publicité de merde!) car cette chose est universelle et rassembleuse. « Tout le monde chie » énonce le spécialiste en art invité à l’émission. L’exposition parcourt le monde et on devance l’objection : « ce n’est pas du gâchis ! .» Ils ont raison, surtout lorsque l’on sait que des êtres humains dehors crèvent de faim juste à l’entrée de ladite exposition.

« Cela nous fait réfléchir…. » non, cela fait réfléchier. Je rejoins ainsi le club des ignares qui ont jadis refusé d’exposer Gauguin…J'assume. Plus tard, semble-t-il, mes arrière petits enfants diront « Dieu qu’elle avait peu de vision ! » À condition que le mot Dieu existe encore à ce moment-là.

Et puis, la question qui tue, vraie question de l’animatrice : « Y a t il quelque chose de belge là-dedans ? »…Là j’ai ri ! (vous n’ignorez pas que les newfies des français sont les belges, qui le leur rendent bien).

Spécialisation : art qui pue
Les cochons tatoués « Louis Vuiton » en Chine, on trouve cela « fabuleux !» J'en ai avalé mon thé de travers - D’où vient l’argent ?...
- Faut se payer les allers-retours en Chine, l’hébergement, la nourriture, le matériel, la main d’œuvre, (on les endort, puis on les tatoue) les chinois, ils n’ont pas fait ça pour rien...
- Les enfants des écoles vont voir les cochons, (car là-bas on n’a pas encore coupé les budgets de l’art à l’école). Finalement je crois que je vais emmener mes petits-enfants voir la machine à merde, afin qu’ils ne prennent pas trop de retard en histoire de l’art.

De qui se moque-t-on ?
En dehors du discours intellectuel, l’artiste se veut pédagogue : « je me moque de l’art, je le fais sans le croire (sic) et je me moque de l’authenticité de l’artiste.» Il se moque aussi, dit-il, de la société de consommation, des grandes marques, et n’hésite pas à utiliser leurs logos en les ridiculisant, sans jamais être inquiété. Plus encore, il paraît que certains patrons de ces gros logos possèdent en leurs salons des œuvres de l’artiste. Et puis, si l’un d’entre eux trouvait un jour que le bouchon a été trop loin poussé, qu’à cela ne tienne, dit l’interviewé : « la prison, comme un musée est un podium ! » - Nous y voilà : Pourvu qu’on parle de moi….Je ne nommerai donc ni l’inventeur génial de cette machine, ni la dame pipi qui vend du papier Q à l’entrée et même des sachets d’excréments « tiens mon chéri, je t’ai rapporté un petit cadeau… » ni l’intervieweuse pâmée devant tant de beauté. « Vous rapprochez le public avec l’art !» lui dit-elle la bouche en cœur (oui, cela s’entend à la radio).

Le comble du comble
La production de ladite machine - des sacs d’excréments scellés - seraient cotée en Bourse ! Là, mon père doit se retourner dans ses cendres. À moins que nous n'ayons à faire à un marketincanular, rien d’étonnant à ce que l’économie mondiale soit constipée.

* le Conseil des Arts du Canada a subventionné une banane qui vole au-dessus du Texas – Il devrait s’appeler Conseil des arts contemporains car dès que l’on colle contemporain à l’art, on obtient souvent de la merde.

** Cloaca 5

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