mardi 8 décembre 2009

Égothérapie

L'égo n'est pas un cadeau...
On ne promeut pas une œuvre parce qu’elle est réalisée par un ami, un malade ou un enfant. On la promeut (et non promouvoit) parce que l’on croit qu’elle est aboutie, techniquement et intellectuellement, parce que l’on pense sincèrement qu’elle apporte(ra) quelque chose à la réflexion de nos semblables – dans les deux sens du mot réflexion – et si possible, qu’elle entrera dans l’histoire de l’art. Nous avons hélas de plus en plus tendance à mélanger la mise en marché mercantile et la mise en valeur de réels talents. Mais qui, me direz-vous, serait apte à juger ? – Ceux qui ont étudié, appris, les professionnels, les pairs et experts. L’art, dans toutes ses disciplines a ses maîtres. Ce ne sont pas forcément ceux qui sont le plus connus. L’image du vieux savant dans son laboratoire existe aussi dans le domaine artistique.
Nous avons également tendance à mélanger compassion et promotion : Regardez de quoi il (elle) est capable ! Et pourtant, il lui manque : un bras, une jambe, une case… La thérapie par l’art est un outil précieux – notamment auprès des jeunes – et c’est malheureusement à ce niveau que l’amalgame se fait entre (re)donner confiance en soi et en la société par l’expression artistique et couvrir de compliments indus, d’expositions complaisantes, commanditées par de bienfaisants béats. Rien n’est plus attristant qu’un niais qui se croit grand. Ce n’est pas rendre service à un ami, à un malade ou à un enfant que de le mettre sur un piédestal duquel il tombera un jour. L’égo n’est pas un remède.
Cela commence très tôt. Nous ne vivons pas dans une société qui prône l’humilité. C’est à peine si l’apprentissage est toléré. Les maîtres se font houspiller et le « t’es capable ! » résonne dans toutes les chères têtes blondes. « Waoh ! que c’est beau mon amour ! » accompagne le plus laid des colliers de pâtes. Nous oublions que se mettre à la portée de quelqu’un n’implique pas forcément de se mettre à son niveau et que le mensonge ne fera pas long feu. L’égo est un poison qu’il faudrait distiller avec parcimonie.

mardi 10 novembre 2009

Éthique et math

Politique de la terre brûlée.
Dans certains jeux de société – surtout la nôtre – la stratégie consiste à empêcher l’adversaire de jouer. Faire un score pitoyable est acceptable pourvu qu’on barre la route aux autres. Après cela, on clame haut et fort « on a gagné ! » et surtout, on donne des leçons de démocratie voire d’indépendance. Ainsi vont les médias, petits et grands : restreindre l’accès à l’information tout en clamant la liberté d’expression elle est là, la pandémie. Liaison dangereuse que celle qui lie un sujet à sa couverture de presse en termes d’exclusivité. Cher lecteur, vous ne connaîtrez pas la programmation des films d’opéra dans les Laurentides car une partie de leur financement est assuré par un grand groupe de presse. Seuls les médias qu’il possède peuvent vous caler ça entre une pizza toute garnie et un vendeur de pneus. Cher annonceur, vous ne savez pas qu’en acceptant un contrat d’exclusivité vous vous liez les pieds. Vous croyez faire des économies ? Oui, sans doute, exactement comme sur un grand bateau, sa clientèle captive. Vous pensez que nous devrions ramer gratis ? Ben voyons…! À ce jeu de c…je passerais volontiers mon tour, à moins que ce ne soit mon arme à gauche et son bagage culturel à vau-l’eau. À propos de tour, ils me font rire ceux qui pédalent fort en se trompant de braquet, ne développent pas grand-chose pour la communauté, ces gens-là.

mardi 6 octobre 2009

Je ne suis pas assez bête pour bitcher


La chasse aux sorcières s’en vient…le 31 octobre.

On me dit parfois « que j’aime tes éditos ! »
surtout quand l’encre contient un peu de nitro…
On me dit encore « Oui, mais je ne l’ai pas compris, celui-là ! »
Bien sûr que si, vous l’avez compris; ce qui vous manque,
c’est de savoir de qui - et non pas de quoi - je parle.
L’important, c’est le quoi, pas le qui.
L’important, c’est le fait, qui peut se répéter si on ne le dénonce pas.
Les intéressés se reconnaissent, c’est suffisant.
TRACES n’est pas un média à potins. Nous ne faisons la course avec personne, pour être les premiers sur le piton.
Donc, vous ne saurez pas qui nous a choqués ce mois-ci pour avoir violé un embargo. Vous saurez simplement que nous en avons été offusqués et que nous ne mangeons pas de ce pain-là. Et donc – et c’est cela qui importe – que l’équipe de TRACES ne dévoilera jamais de dossier confidentiel, bien que nous soyons aux premières loges pour les voir passer.

samedi 19 septembre 2009

Luchini à Montréal

Les gens qui peuvent se le permettre….

Les porte-monnaie sont un peu plats en ce moment et on se demande QUI peut se permettre de dépenser 240 $ pour partager avec un être cher un moment de bonheur culturel à 120 $ la place.
MOI !
VOUS !
NOUS !
La dépense peut s’inclure dans n’importe quel budget. Si votre artiste favori passe une fois par an à Montréal, un café par jour pendant trois mois, c’est ce que cela coûte environ. Et ne me dites pas que vous ne faites jamais de dépense inutile, en débit de vos maigres ressources.
Faire une cagnotte culture/sortie/théâtre est aussi valable que de faire une tirelire vacances/voyages. Les banques qui nous inondent de cartes à points évasion devraient penser à offrir des points à consommer sur place. Les artistes seraient mieux nantis, le public plus averti, les commerces environnants plus achalandés; car…après le spectacle, on va quand même boire un petit café.

lundi 31 août 2009

L'art de la guerre



« La reine est fâchée » Emma 4 ans ½



Du haut de ma tribune, j’aperçois un gueux qui se dit Roy, un faux avocat, vexé par procuration
de quelques propos tenus dans mes éditos. Le triste sire se faisant le héraut de dame Insécure
remit au FASS* un parchemin dénonçant ma liberté d’expression (1) enjoignant la belle compagnie de ne plus suivre nos TRACES pour annoncer. Utilisant comme il se doit l’anonymat, la mauvaise foi et la calomnie, le preux chevalier connaît l’art de la guerre.

Moi aussi : l’art - et la guerre, mes parents m’en ont beaucoup parlé…
Je reconnais l’homme, son courage, ses méthodes.

Créer, éditer, écrire TRACES est un privilège, un honneur, une responsabilité. Je tente de soutenir les arts et la culture, qu’elle soit francophone, anglophone, japonaise ou autre, pourvu qu’elle soit culture. Les jeunes en profitent pour faire chez nous leurs premières armes de futurs chantres, artistes ou journalistes. Il ne se passe pas un mois sans que je reçoive une requête de jeune volontaire ou aspirant journaliste. Plusieurs étudiants travaillent au journal depuis le début; plusieurs anglophones aussi.

Un édito n’est pas fait pour plaire mais pour réveiller certaines léthargies bien connues dans le plus beau des pays et sa région probablement la plus endormie.



FASS : Festival des Arts de Saint-Sauveur


Pour ceux que cela intéresse…
(1) Voir éditos sur blog de TRACES :
L’art et le procédé (nov 2008)
An English message will follow (mai 2009)
Des cliques et des claques (juillet 2009)

lundi 13 juillet 2009

Des cliques et des claques

Une clique d’adultes avertis, universitaires galonnés, prennent en charge quelques ados plus ou moins décrocheurs et prétendent les aider à rentrer dans le rang en les intégrant à un projet subventionné d’exposition collective parascolaire. Jusque là, rien que de très louable.
On met les jeunes en situation dans un contexte muséal où ils vont faire un bref (trop bref) apprentissage de la vraie vie d’artiste. Toutes les règles sont respectées de A jusqu’à presque Z. Les jeunes produisent un beau travail, la clique est fière, le projet et ses subsides pourront être reconduits. Amis, parents, enseignants et organisateurs forment la claque, comme au théâtre de Molière. Mais on a choisi un lieu public reconnu pour ses expositions professionnelles; nous ne sommes pas dans les couloirs d’une école et ce lieu reçoit régulièrement la visite, de chroniqueurs chevronnés.
L’un d’eux passant par là, fut assez fou pour entreprendre la critique d’une des œuvres en nommant son auteur. Aucune mention condescendante soulignant la jeunesse des exposants. Non, l’étudiant a bénéficié d’une vraie bonne critique équilibrant le pour et le contre de certains aspects de son installation et faisant allusion à la pratique de grands artistes. Rien dans le texte ne pouvait laisser deviner que l’on ne parlait pas d’un vrai artiste. De quoi être réellement fier pour une première exposition !
Pas du tout ! Le jeune n’a pas eu le choix ni le loisir de savourer son succès.
Aux dires de la clique et de la claque, une entreprise de démolition aurait été menée contre un projet éducationnel, une attaque visant un jeune en particulier aurait été lancée - et vous savez quoi ? – On aurait intérêt à prendre en compte le danger de suicide chez les adolescents avant d’écrire quoi que ce soit!...
Cette goutte-là a fait déborder un vase déjà fort plein de visites, de courriels et de téléphones de remontrances. Celle-là, on ne la prendra pas et on la renverra à son expéditeur, dans son contenant d’apitoiement new age indigne de l’éducation que l’on prétend vouloir dispenser.
Et puisque l’on tient tant à exposer ce que les jeunes ont à exprimer, pourquoi la clique et la claque imposent-elles leur ressenti(ment) tout en interdisant l’accès des journalistes au jeune en question ? Peur d’avoir dépassé la pensée du soi-disant désespéré ? Peur d’aller jusqu’au bout du processus de mise en situation professionnelle ? Peur de dévoiler qu’on s’est finalement monté le bourrichon à partir d’une erreur de lecture ? L’expérience a été menée de faire lire le texte incriminé (Gilles Matte, ed.TRACES juin 2009 p.11) par plusieurs universitaires également galonnés, mais n’ayant -eux- aucune connexion de clique ni de claque et n’étant prévenus d’aucune manière des remous en cours. Aucun lecteur n’a relevé d’attaque de quelque nature que ce soit. Alors, la question se pose maintenant : quelle est la pomme qui a contaminé le panier ?...Sommes-nous obligés de supporter la paranoïa de quelques-uns ? N’avons-nous pas mieux à faire que de nous disputer sur la tête de nos enfants et ne devrions-nous pas les accueillir plus intelligemment dans notre monde d’adultes en le leur faisant découvrir tel qu’il est, plutôt qu’en les surprotégeant malgré eux et en les berçant d’illusions, aussi artistiques soient-elles ?

jeudi 18 juin 2009

pas de culture, pas de touriste

Un touriste est une personne qui visite la culture d’un pays.
Quand on lui demande qu'est-ce que tu as vu ? Il sortira le plus souvent des photos d'un site de patrimoine naturel ou bâti, puis il montrera une pièce d'art local, qui rejoindra la collection témoin de ses voyages et racontera les spectacles auxquels il a assisté.
Il n’a pas envie de savoir que M. le maire Untel n’a pas fait ses devoirs ou que le Dr Machin est malheureux en ménage. Il a tout ça chez lui aussi, le touriste.
Là, il est en vacances. Il veut vivre un moment sans soucis et trouver son bonheur sans perdre une minute. Il veut savoir où aller manger, skier, nager, faire du vélo, visiter des expos…
Il ramènera TRACES chez lui, comme une photo de notre coin de pays. Et puis, si le cœur lui en dit, il reviendra nous visiter sur notre site Internet qu’il partagera avec ses amis : voyez comme c’est chouette là-bas dans les Laurentides ! Un esprit, une atmosphère, des événements, des ateliers ouverts…
Ce mois-ci, le touriste découvrira (peut-être avec étonnement) qu’il se fait de très bons fromages au Québec, il prendra son temps pour déguster un vin, il repartira avec des idées à implanter dans son pays, sans oublier de garder un œil sur les mouvements tectoniques des grandes nations.
Soyez le très bienvenu, Monsieur le touriste, c’est avec la plus grande joie et la plus grande fierté que nous vous présentons notre région.

lundi 15 juin 2009

Petit journal polisson


Je ne sais plus qui a dit, ou bien si c’est de ma tête que c’est sorti…

L’optimisme à un certain stade devient un acte révolutionnaire.
Mais oui, justement en ce moment et particulièrement au Québec. Vous me suivez ? Me semble que je suis une révolutionnaire de naissance – et d’héritage (merci Papa ! dès fois qu’il me lise là-haut.)
Au cours d’une formation du Conseil de la culture des Laurentides sur le branding j’ai appris ce qu’était un parangon. Le terme, apparu en français en 1504, provient de l'espagnol parangon (comparer) et du grec ancien παρακονη (lire comme ça se prononce : parakonê, pierre à aiguiser). Le parangon est donc un modèle stimulant sur lequel on peut affûter son optimisme. J’en ai rencontré un cette semaine. Jusqu’à présent, je cherchais un riche mécène, je crois qu’en attendant, je vais m’occuper de mon parangon. Je ne l’ai pas cherché, c’est lui qui est venu à moi, un rare soir de souper à deux dans un coin discret du restaurant Viva de Sainte-Adèle. « Excusez-moi, c’est vous, Madame TRACES ?... » - Et de me couvrir d’éloges sur la qualité de notre magazine. Il sait de quoi il parle : c’est un confrère – Et pas des moins visibles dans la région. Nous nous congratulâmes donc réciproquement. Lui sur mon contenu, moi sur son contenant. Vous me suivez toujours ?...Et mon optimisme naturel, sans lequel je ne pourrais rien réaliser, me souffla un grand vent d’espoir : Quelle belle première ce serait ! La révolution des attitudes - au lieu de se tirer dans les pieds - regarder ensemble dans la même direction, respecter le travail de l’autre et s’épauler.
Oui, oui, j’y ai pensé au renard « tout flatteur vit aux dépens… » mais laissez-moi donc rêver !
Et puis...un renard, ça s'apprivoise, non ?

samedi 16 mai 2009

An English message will follow...


« Je ne sais comment recevoir votre message en anglais, il me met très mal à l’aise. À un point tel que je vous demande de ne plus m’envoyer de message. »
Reçois-le comme tu veux, mon grand, et retourne dans ta tour d'ivoire.
Ce qui me met, moi très mal à l’aise, c’est qu’un intellectuel puisse propager un tel ostracisme. En fait non, il s’ostracise lui-même.
En fait si, il doit certainement propager.
Fort heureusement, il n’empêche pas la culture de vivre, il s’en prive d’une grande partie en se retirant dans sa dignité de Québécois offensé : On a osé lui faire parvenir un message en français, suivi de sa traduction en anglais ! Pensez-donc, quelle hérésie! Le message ne s’adressait pas qu’à lui et ce n’est pas le comportement idéal pour intéresser la communauté anglophone à notre culture (qui soit dit en passant, n’est ni la seule ni la meilleure au monde).
Comme un fait exprès, voilà que notre chroniqueur rencontre une artiste anglophone, échange avec elle et valide ses perceptions dans les deux langues. (Article Gilles Matte/Susan Lee, Arrachons la page ! Brûlons le Musée d’Art contemporain des Laurentides !
Comme un fait exprès, une journaliste anglophone écrit dans notre magazine, se donnant la peine d’utiliser notre langue (Article Ilania Abileah/France Paquette). On la lit ou on ne la lit pas, celle-là ?... Ah ! dilemme ! Et l’exposition en question est accrochée à Ici par les Arts. Savez-vous qui dirige cet organisme de réinsertion de jeunes de toutes provenances ? Excuse-nous Jennifer, on va brûler Ici par les Arts !
Et je vous jure que nous ne l’avons pas fait exprès. Pas notre genre de provoquer. C’est juste dans l’air de ce mois-ci. Et moi, cet air de printemps, je le hume à pleins poumons et j’ouvre en grand toutes les portes et fenêtres de ma maison. S’il avait fallu que je refuse tout ce qui n’était pas français dans ma vie, je n’aurais pas eu le privilège de faire le tour du monde, de m’enrichir de cultures très différentes et de partager avec vous ce qui m’enthousiasme aujourd’hui : La culture dans les Laurentides, ses artistes francophones, anglophones et autres (rencontré une belle artiste afghane ce mois-ci), ses villages aux consonances anglaises ou françaises, son histoire issue de pionniers de diverses origines, bref tout ce melting pot, ce patchwork, ce puzzle , ce cocktail, (Là, j’exagère…) de saveurs complémentaires parmi lesquelles nous cherchons laborieusement une identité régionale.

P.s. Je pense que j’ai perdu un lecteur…au moins.

samedi 2 mai 2009

Hasard et création


« …réalité hasardeuse, jamais tracée d’avance, [qui] demeure au cœur de ses préoccupations » (1)
« constructions (…) très précaires qui tiennent le coup, entre autres, par le fond narratif qui les tisse. »(1)
Parle-t-on de politique ? Cela se pourrait. On aurait alors affaire à une belle définition de la langue de bois, de message vide de sens, de ratage de projet. Évidemment, j’extirpe ces mots de leur contexte afin d’illustrer mon propos, et je m’essaie au cut-up, mais lorsque les spécialistes essaient de justifier le « travail » incompréhensible d’un artiste, ils utilisent trop souvent ce genre de phrases. L’artiste a des préoccupations, il s’interroge, il questionne et nous restons pris avec le questionnement du torturé des méninges.
L’art doit être clair et se suffire. Il doit générer l’émotion, l’admiration, la reconnaissance de références. L’art est langage, ce n’est pas une charade, encore moins un discours d’initié. Un public cultivé reconnaîtra plus de références qu’un autre, mais le rôle attirant et rassembleur de l’art devrait rester l’essentielle préoccupation de l’artiste.
Un aspect qui me gêne encore plus est le langage introspectif du crucifié qui étale ses tripes au soleil.
« Les maux ne valent que par la qualité de ceux qui les expriment » (2) et cette qualité-là sous-entend une dignité empreinte de pudeur. Il faut s’appeler Picasso pour dévoiler Guernica.

(1) Jérôme Delgado, le Devoir, 29 mars 2009 p.E8
(2) d’après la citation d’Alain Genestar, ex dir.Paris Match « Les mots historiques ne valent que par la qualité de ceux qui les prononcent »

samedi 18 avril 2009

Travail d'artiste

« Des constructions (…) très précaires qui tiennent le coup, entre autres, par le fond narratif qui les tisse. »(1)
Parle-t-on de politique ? Cela se pourrait. On aurait alors affaire à une belle définition de la langue de bois, de message vide de sens, face à un ratage. Évidemment, j’extirpe ces mots de leur contexte afin d’illustrer mon propos, et je m’essaie au cut-up mais lorsque les spécialistes essaient de justifier le « travail » incompréhensible d’un artiste, ils utilisent trop souvent ce genre de phrases. L’artiste a des préoccupations, il s’interroge, il questionne et nous restons pris avec le questionnement du torturé des méninges.
L’art doit être clair et se suffire. Il doit générer l’émotion, l’admiration, la reconnaissance de références. L’art est langage, ce n’est pas une charade, encore moins un discours d’initiés. Un public cultivé reconnaîtra plus de références qu’un autre, mais le rôle attirant et rassembleur de l’art devrait rester l’essentielle préoccupation de l’artiste.
Un aspect qui me gêne encore plus est le langage introspectif du crucifié qui étale ses tripes au soleil. « Les maux ne valent que par la qualité de ceux qui les expriment » et cette qualité-là sous-entend une dignité empreinte de pudeur. Il faut s’appeler Picasso pour dévoiler Guernica.

(1) Jérôme Delgado, le Devoir, 29 mars 2009 p.E8
(2) d’après la citation d’Alain Genestar, ex dir.Paris Match « Les mots historiques ne valent que par la qualité de ceux qui les prononcent »

vendredi 10 avril 2009

De quoi j'me mêle

Ma langue est bien trop belle pour être mise dans n’importe quelle bouche.

J’ai toujours cru que, plus on parle de langues, plus on comprend le monde. La guerre des langues en Belgique, au Québec, en Suisse, au Pays Basque, en Catalogne trouble les relations internes et gâche la construction identitaire.
Pierre Falardeau voudrait que nous regardions ailleurs pour tirer des leçons de liberté,(1) mais surtout pas en versions originales. Pouah !
Le monde entier devrait-il parler français pour être recevable ? – Notre langue est bien trop belle pour être mise dans toutes les bouches – Bien trop complexe pour tous les esprits. Si le monde entier baragouine l’anglais sans que personne – sauf Shakespeare – ne s’en formalise, c’est que la syntaxe en est simple. Je n’ai pas dit simpliste – Il y a chez les British des subtilités savoureuses. Mais le français est un art en soi. Une dentelle fine.
Le danger pour les québécois n’est pas d’être entourés d’anglophones, c’est d’être sous cultivés dans leur propre langue; c’est de laisser aller le français à vau-l’eau et de se rebiffer quand on le leur fait remarquer. Se donner la peine d’apprendre et de transmettre, de valoriser, de préserver le patrimoine identitaire, c’est d’abord se donner la peine d’apprendre, de transmettre, de valoriser, de préserver la richesse de la langue que l’on revendique. On dirait que le Québécois est dérangé par l’anglais et gêné par le français. Qu’il s’agisse de ces deux langues ou de leurs représentants. Vis-à-vis des Français, le Québec oscille entre l’admiration béate et le rejet viscéral. Entre le piédestal sans fondement et la jalousie haineuse. Passant de l’un à l’autre extrême sans nuance. À l’image des saisons qui le façonnent, le Québécois, quand il ne triche pas en Floride, est un être brut de presse, souvent attachant, rarement attaché. Ici, l’éphémère est un vent fou sans direction.

(1) Pierre Falardeau, Rien n’est plus précieux que la liberté et l’indépendance 2009 – Ed.VLB

mercredi 1 avril 2009

La charrue avant les boeufs

Bricolage institutionnel
Prenez un artisan qui apprend son métier. On lui donne un outil, on lui apprend à s’en servir, à le régler, à l’entretenir, à l’améliorer (bis). Il devient un expert en manipulation et va pouvoir transmettre son expertise à des jeunes. Il leur donne des outils, leur apprend à s’en servir, à les régler, à les entretenir, à les améliorer (bis). Il encourage ses élèves, les loue, les félicite, car lui-même a connu de « bons maîtres ». À la fin de l’année, il exposera leurs travaux, que parents et amis viendront admirer. Le journal local aura dépêché un de ses stagiaires et pris la même photo que l’an passé : dans l’ordre habituel, M. Machin, Mme Truc, M. le Maire, les élèves Jonathan, Fabien, Pierre-Luc…Les jeunes, qui n’ont connu que louanges et lâche pas se croient arrivés et on s’étonnera ensuite que le mot artisan au Québec soit dévalué. C’est que l’enseignement fait fausse route. Dilué dans une éducation sirupeuse, l’enseignement a oublié la matière. Confondre l’outil et le bois, le progrès et l’aboutissement, transmettre aux générations futures une discipline laudative issue du développement personnel, amènent une culture d’autosatisfaction. Chômage et petits boulots sont au rendez-vous. Loin des écoles, les ministres cherchent des solutions en se gardant bien d’entrer dans le vif du sujet. Le système continue à former des éducateurs plutôt que des instructeurs. Les cours du soir pour adultes repêchés sont donnés par des PhD, Mba et autres diplômés universitaires, tandis que dans le circuit normal la médiocrité peut être transmise par des bacheliers en éducation.

lundi 23 mars 2009

Les perles en saignantes

D’ une école du Québec au printemps 2009
sujet: parution d'article
message: Bonjour, je suis enseignante dans une école primaire et j'aimerais promouvoir l'art dans les écoles. Un grand nombre de mes collègues enseignent de belles techniques et les élèves forment des œuvres extraordinaires. Par exemple, une enseignante de 2e année à amener ses élèves à peindre une œuvre à la «Riopel» combinée à un collage. Ce fut fabuleux pour les yeux. Pensez-vous qu'il est possible que je vous envoie un article avec photo? Merci de votre collaboration, Ginette xyz enseignante anglais langue seconde.

Si l’enseignante de 2e année à amener ses élèves à peindre, il est probable que Riopel ne manquera pas de main d’œuvre dans dix ans. Quant à Jean-Paul, heureusement que Google donne les deux orthographes. On peut ainsi tomber - par hasard - sur l’artiste et promouvoir l’art dans les écoles. Mais en attendant que les profs s’instruisent, on a tout lieu de s’inquiéter de l’avenir de la langue première.

jeudi 12 mars 2009

Le mieux et l'ennemi du bien

Pour le meilleur et pour le pire
États-unis 5 novembre 2008, le monde se réveille en état de choc. Jusqu’au dernier moment on n’osait y croire : à la Maison blanche, le président est un noir !
Pour la première fois depuis longtemps, des enfants fouleront les tapis de la résidence présidentielle, depuis longtemps aussi : un président écrivain.
Je pense à cette femme au fond de l’Afrique, qui apprend que son petit fils est devenu… Excusez du peu !
Séquence : Jésus - Luther King – Kennedy – Obama…qui osera ? ou plutôt quand ?...
Il est important de savoir si le monde aura le temps de se reprendre, de se réapproprier une dignité. Aurons-nous le temps de rêver ?
Pouvons-nous encore rêver ?
Tandis qu’une lueur d’espoir point à l’horizon, des savants s’activent à combattre la pollution.
Les voitures, les maisons, les usines doivent être moins polluantes, les bombes aussi. Des bombes écolos ! Ça c’est rigolo ! Tuons les gens écologiquement. Un label de qualité avec ça ?

samedi 7 mars 2009

Plus mort que ça, tu meurs...

Plus mort que mort si tu es de mon pays ?
J’ai une drôle de sensation quand la presse parle « d’un Montréalais blessé lors de l’attentat qui a eu lieu à New Dehli » ou lorsqu’on s’interroge sur le nombre de citoyens de mon pays qui ont été tués en Afghanistan. En ce qui concerne le Montréalais : sa famille est-elle au courant au moins ? – Va-t-on inquiéter tous les Montréalais qui ont un parent dans cette région du monde ? – Depuis quand la reine des petites culottes pour ados, de surcroît amie de la Ministre Untel, est-elle plus morte que le pauvre abruti qui passait là par hasard ? Je suppose que dans tous les pays c’est la même chose, on trie les chers disparus pour montrer combien on est personnellement ou commercialement touché par l’événement. Lors d’un deuil, on pleure beaucoup sur soi-même. Cent cinquante morts anonymes me suffisent pour compatir et même un seul. Il y a de l’indécence à sérier les victimes. Évidemment, une exception serait celle de la mort d’un grand savant ou grand penseur qui priverait alors l’humanité de ses lumières. Pour autant qu’il fût reconnu de son vivant et non pas découvert subitement après sa mort. L’aimait-on ?...Il fallait le lui dire quand il pouvait l’entendre, lui offrir les moyens de déployer son art plutôt que dépenser en hommages posthumes. Mais là est un autre sujet.

lundi 23 février 2009

Quelle sorte d'artiste êtes-vous ?


Selon Michel Drucker, grand découvreur de talents devant l’Éternel, il y aurait quatre sortes d’artistes :
1- les sans talents et humainement méprisables, dont on ne parlera pas,
2- le grand talent humainement détestable, duquel on ne peut pas se passer – talent oblige,
3- les très populaires (70%) qui ne se prennent pas pour d’autres, et que l’on ne prend pas pour d’autres non plus,
4- le talent fou, humainement formidable, partie d’un club très fermé de gens qui n’oublieront jamais ce que l’on a fait pour eux. Autant dire qu’ils sont très peu nombreux.

mercredi 18 février 2009

Quossé ça, le journalisme culturel ?

Afin de nourrir votre réflexion, j’ai interrogé un scientifique, dont les préoccupations professionnelles sont aux antipodes des miennes : le journalisme et la vie culturelle. Docteur en physique et professeur en mathématiques, Christian Delpla a répondu à mes questions.

Q. À votre avis, qu’est-ce que le journalisme culturel ?
Un journalisme qui cherche à faire ressortir les différents traits culturels d’une région, d’une population.

Q. Que nommez vous trait culturel ?
Un mode de vie, de pensée, une façon de s’exprimer, de manger, de gérer les liens sociaux.

Q. À quoi sert le journalisme culturel ?
À informer, à définir, à forger des opinions.

Q. Serait-ce un journalisme d’opinion ?
Culturel ou non, le journalisme peut être purement informatif mais il y a un journalisme qui considère, qu’au-delà des faits, il doit livrer une proposition, une expression d’opinion - dépassionnée, à moins que l’actualité l’exige autrement (urgence, crise…).

Q. En quoi peut-il y avoir crise ou urgence dans le monde culturel ?
La culture englobe tout. Ne pas vouloir s’en occuper c’est vivre dans une caverne. Les Accommodements raisonnables, la guerre en Irak (chrétiens contre islamistes) sont des crises culturelles. La relation entre le Canada anglophone et le Québec francophone est une relation culturelle, empreinte d’une dissonance culturelle, qui aboutit à une dissonance politique et économique. Dissonance culturelle et dissonance politique aboutissent toujours à une dissonance économique, c’est ce que l’on a appelé la colonisation, en particulier.

Q. Si le monde culturel est si important, pourquoi est-il si peu considéré ?
Parce qu’il est le moins visible, le moins quantifiable. La politique (les élections), le commerce (les revenus) parlent plus aux gens. Il faut déjà être éduqué pour prendre conscience, analyser, évaluer les attendus culturels d’une situation. Il est beaucoup plus simple de parler du PIB (produit intérieur brut) ou du pourcentage obtenu aux élections.
La culture est souvent ce que l’on ressent sans être capable de l’analyser. La culture, c’est ce qui reste en dessous des différentes couches de la société, c’est ce qui est plus profond et plus durable, c’est le devoir du journaliste culturel de faire remonter cette couche à la surface.
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Ce texte a été réalisé en février 2009 pour Emmanuelle Lebeau-Guertin, étudiante à l’UQAM en Communication, Politique et Société, pour un travail en journalisme au sujet de l’importance du métier de journaliste culturel.

mercredi 11 février 2009

L'eure est grave

Dans notre société québécoise, qui veut défendre becs et ongles la langue française et malgré un féminisme exacerbé, une méconnaissance du genre féminin s’est installée, par une sorte de confortable paresse. Pour nommer une femme à la barre, on la définit sans distinction par des areu areu. Puisque une écrivaine est une auteure (tiens ! mon ordinateur souligne le mot en rouge…) et qu’une professeure (là encore…) est une professionnelle reconnue (au moins par ses élèves) pourquoi se donnerait-on le mal de puiser dans la mémoire scolaire ou dans le dictionnaire pour parler de sculptrice, de graveuse, d’entraîneuse (là, encore une fois, on aimerait bien que le contexte sauve la réputation…) performeuse, supportrice, détentrice d’une réelle féminité linguistique ? Tous ces mots et de nombreux autres, se retrouvent affublés de terminaisons en eure. Pourquoi se soucier du bien parler puisque, ce matin même, sur notre plus grande chaîne nationale, à l’heure de pleine écoute, une de nos ministres francophone – et pas des moindres – se proclame défensseresse de quelque grand principe ?
Fait-on un lapsus ? – ok – On peut se reprendre et s’excuser, comme lorsqu’on tousse à la radio. Tousse n’étant pas le féminin de tous…

dimanche 8 février 2009

Cacahuètes et tournesol (idées à picorer entre nous)

Des chiffres et des lettres…
Les chiffres seuls ne parviendront jamais à asseoir l’indépendance de quiconque, c’est la conjugaison du savoir faire et du savoir qui fournit la force nécessaire à la liberté des peuples et des individus.
Peuples et nations…
Un ensemble de personnes habitant un même territoire, qui ne connait pas ce territoire, et le détériore par insouciance, ne constitue pas un peuple, encore moins une nation. Si on ajoute l’ignorance du monde extérieur ou de l’histoire de l’humanité, donc l’incapacité à se forger un modèle de société, on obtient un tas d’épais.
La base de la société.
Quoi qu’elle devienne, quelques transformations profondes qu’elle subisse plus tard, la base de notre société sera toujours une table avec autour : papa, maman et leurs petits. L’avenir est là, et non dans les éprouvettes ou la recherche atomique.
C’est pour cela que le choix d’une table à manger est d’aussi grande importance pour moi. Elle doit être grande, lourde pour la stabilité et posséder deux belles rallonges…au cas où.

mardi 3 février 2009

Le mâle entendu et les connes citoyennes

« Vous devez être un bon meneur d’homme ?... » suggère l’animatrice, flatteuse.

« Je travaille avec des femmes aussi !... » répond l’invité flatté.

Dans notre société, de nombreux malentendus se sont installés, tels celui-ci. Le mot homme se ratatine au sens masculin, alors qu’il avait atteint le statut d’humain…quand ses utilisateurs n’avaient pas encore perdu la nuance du contexte.

Lorsque le masculin l’emporte grammaticalement sur le féminin, comment peut-on se sentir supérieur ou inférieure en tant qu’humain, sans faire preuve de mauvaise foi ou d’inculture ? Dans bien des domaines l’inculture mène à la guerre; on n'en fera pas la liste ici. La guerre des sexes en est un modèle particulièrement ridicule du genre.

Lorsqu’un texte indique en préambule que le masculin est employé pour faire plus court…l’ironie s’empare de ma lecture et nuit à l’intérêt que je pourrais porter à son contenu. Lorsqu’un représentant politique s’adresse à ses concitoyennes et concitoyens : je m’attends à me faire haranguer bientôt en tant que conne citoyenne.

vendredi 30 janvier 2009

Faire une scène à l'artiste

La fin des allumettes

Hier, je suis allée voir un ami chanter. Nous étions convoqués à 20 h 30 il a commencé à 22 h 15. Je suis partie à 23 h. Pourquoi ?...

Nous sommes en face d’un interprète immense. Les plus beaux textes de la chanson francophone sont diffusés par une voix adaptée, une diction modulée, un doigté de guitare sensible et sûr.

Arrivé très en avance dans le petit cabaret, l’artiste faisait le tour des tables, distribuant accolades et plaisanteries : parents et amis se réjouissaient. Des jeunes aussi. Il commença son spectacle en disant combien il était heureux de se trouver ici… On avait hâte de l’entendre chanter.

Mille chansons ouvrait le bal comme d’habitude. On laissera le bénéfice du doute : il aurait dû s’échauffer avant. Une chanson de Gilles Vigneault, abondamment commentée, fut exécutée par une voix de tête, très différente de la voix naturelle de l’interprète. Un peu de morale au sujet des homosexuels, et c’est Aznavour qui se fait massacrer par des blancs de mémoire sous formes de silences souriants et strophes sautées, après trois reprises.

De la mémoire, mon ami en a tout une : il connaît un nombre incalculable de textes, ainsi que leurs contextes. C’est un être passionnant - lorsqu’il est sobre…

Nous sommes en face d’un artiste vieillissant. Beaucoup vous ont un charme !...D’autres se croient permis de relâchement. C’est, je crois, la différence entre un vrai professionnel et un bourlingueur. Comment peut-on jeter aux orties un don de Dieu ? (je ne crois pas vraiment en Dieu avec toutes les saletés qu’il laisse se produire dans le monde, mais cela fait joli d’appeler cela ainsi : un don de Dieu).

Les ingrédients du succès (nul besoin qu’il soit planétaire) se résument en TTT : talent, travail; ténacité. Quand un artiste cumule plusieurs dizaines d’années de travail, que son talent est intact, qu’il a la chance de pouvoir durer grâce au répertoire qu’il porte, comment se fait-il qu’il se mutile ? J’oublie un quatrième T : Tenue sur scène. Nous avions ce soir-là un public de tous âges, dont une grande partie était acquis d’avance. Deux journalistes dans la salle. Et aussi quelques représentants d’une obédience qui peut beaucoup pour ses membres, ainsi que d’anciens camarades de classe long-time-no-see bien installés dans la vie. Pourquoi un tel gâchis, quand on sait que la suite dépend toujours de quelqu’un dans la salle ?

Quel manque de respect pour des gens –certains très jeunes- qui ont payé 10 $ l’entrée plus une, ou deux ou trois consommations c'est-à-dire une dépense de 100 $ pour un couple ! Et même si cela avait été gratuit, un artiste ne se doit-il pas à son public ?

S’il n’y avait eu que deux jeunes dans la salle qui auraient pu - ce soir-là - découvrir ce que notre culture véhicule de plus beau : Brel, Brassens, Ferret, Duteil, La langue de chez nous. C’est sur cette chanson-là que nous nous étions rencontrés, mon ami chanteur et moi. Hier, je suis partie avant, afin de préserver le souvenir et aussi parce que je déteste voir un ami se dégrader par sa propre volonté. Le suicide en direct, ce n’est pas ma tasse de T et si j’ai envie d’aider quelqu’un, il faut qu’il ait le goût de se relever. Si j’avais un conseil à donner à mon pote, ce serait d’éviter les cabarets, de bannir les soirées, ce n’est plus fait pour lui - la nuit - car il a craqué ses dernières allumettes.
P.S.
Je ne vous donnerai pas le nom de l’artiste - c’est un ami – et pourquoi l’accabler : il n’est pas le seul dans son cas…

lundi 26 janvier 2009

Écho de la salle des profs…


« Hier, j’suis t’allé…. »
Oui je sais, mais quand je parle, je me détends – Évidemment lorsque je suis devant les élèves, je surveille mes liaisons. Et puis j’ai bien le droit de joualer un peu… »


Pardon, monsieur, ce n’est pas du joual ça, et je ne vois pas en quoi le fait d’introduire sciemment des fautes de français peut constituer une détente. Que vous lâchiez des gros mots pour vous détendre, passe à la rigueur, si vous vous êtes pris le doigt dans la porte, mais bafouer l’orthographe du verbe, c’est vicieux tout de même. Rien ne garantit qu’un jour vous n’écrirez pas je suit allé. Si je vous faisais un procès d’intention, je dirais que vous avez honte, même devant vos collègues, de votre érudition. Vous souhaitez vous fondre dans la masse, dont vous avez de toute évidence une piètre opinion puisque vous vous abaissez au niveau que vous lui prêtez. L’effort linguistique que vous prétendez fournir en classe est-il si insurmontable que vous vous sentiez obligé de vous détendre ? Comment peut-on être sûr que ce relâchement ne vous prenne pas de temps à autre en présence de vos élèves ? « Attention à vos enfants, c’est peut-être le nôtre ! ».

mardi 20 janvier 2009

L’art et le procédé


Vendre son art, pour un artiste est un art délicat, délictueux parfois…
Certains artistes autoproclamés ne vendent pas de l’art, mais un procédé.

La différence se situe au niveau de l’expression et donc de l’intention :
  • Veut-on exprimer son moi le plus profond, sa vision du monde, son désarroi ou son enchantement ?
  • Est-ce là une nécessité vitale, un mode de vie et de communication, un langage ?
  • Veut-on devenir riche et célèbre, voire célèbre et pas riche ou riche incognito ?
  • Il s’agit alors de mettre en marché la poudre aux yeux pour non initiés. La culture artistique est si peu développée, qu’il est très facile de fourguer n’importe quoi à n’importe qui, pourvu que l’on ait pignon sur rue – donc déjà beaucoup d’argent à investir dans le pignon. Ainsi fleurissent les galeristes vendeurs de procédés – souvent galeries d’un seul artiste qui vend sa merde à des ignares. Dis-moi qui tu aimes et je te dirai qui tu es; cela vaut pour tes goûts en art visuel autant qu’en musique, en littérature, en théâtre…bref en art. Cependant, on s’identifie plus aisément à un niveau culturel en musique, c’est moins évident en art visuel. Le procédé donc, est une technique facilement identifiable, une expression si répétitive qu’elle ne peut provenir d’une intention intègre. Au diable le dessin, la charte des couleurs, le souci de la conservation de l’œuvre. Tout cela nécessite de fastidieuses études. Passons directement au cash.
Le MacDo de l’art n’est en aucun cas de la gastronomie.

lundi 19 janvier 2009

Cloaca V - Après la banane, l'étron !


Ah ben, j’ai mon voyage !... Après la banane*, l’étron !
L’art contemporain : séduisant, plaisant, agréable, réconfortant…dit-on. Ah oui ?!?!
Annie Depont
Dans « art contemporain » ce qui m’interpelle c’est le mot « contemporain », ce qui me gêne c’est le mot « art ». Je peux choisir de me laisser ou non interpeller, mais je m’insurge à laisser le mot art ou artiste fréquenter n’importe quoi ou n’importe qui.

Je ne m’imagine pas du tout emmener mes petits-enfants voir une machine qui fait caca** ni les encourager plus tard à fréquenter une telle université, qui oublie de mettre ses priorités au bon endroit. Il paraît que cela fait rire… pipi caca : c’est à la maternelle que cela fait rire !

L’UQAM dans la merde ?...Pas tant que cela, semble-t-il, car une telle exposition ne coûte pas trois sous, mais on nous rassure : le projet avait été ficelé AVANT donc cela ne compte pas !

L’art est-il constipé ?... "Comment se fait-il que cela ait pris tant de temps ? "demande la présentatrice de Radio Canada. C’est vrai, Montréal n’attendait que ça : sortir de la marde blanche pour en admirer une autre, plus vraie que nature, on se sent enfin soulagé ! Non, ici l’art n’est pas constipé : il faut que la machine produise, sinon il n’y aura plus d’exposition et l’on nous analyse la matière finement : « comme la machine ne connaît pas de stress, elle ne peut être constipée, ni indisposée, nous obtenons une matière fécale idéale et constante.» - Odorante ? demande l’un - Oui ! répond l’autre.

On parle d’une « matière fécale objective »…Deux repas (équilibrés !) par jour, parfois préparés par les plus grands chefs, notamment à Lyon, en France (publicité de merde!) car cette chose est universelle et rassembleuse. « Tout le monde chie » énonce le spécialiste en art invité à l’émission. L’exposition parcourt le monde et on devance l’objection : « ce n’est pas du gâchis ! .» Ils ont raison, surtout lorsque l’on sait que des êtres humains dehors crèvent de faim juste à l’entrée de ladite exposition.

« Cela nous fait réfléchir…. » non, cela fait réfléchier. Je rejoins ainsi le club des ignares qui ont jadis refusé d’exposer Gauguin…J'assume. Plus tard, semble-t-il, mes arrière petits enfants diront « Dieu qu’elle avait peu de vision ! » À condition que le mot Dieu existe encore à ce moment-là.

Et puis, la question qui tue, vraie question de l’animatrice : « Y a t il quelque chose de belge là-dedans ? »…Là j’ai ri ! (vous n’ignorez pas que les newfies des français sont les belges, qui le leur rendent bien).

Spécialisation : art qui pue
Les cochons tatoués « Louis Vuiton » en Chine, on trouve cela « fabuleux !» J'en ai avalé mon thé de travers - D’où vient l’argent ?...
- Faut se payer les allers-retours en Chine, l’hébergement, la nourriture, le matériel, la main d’œuvre, (on les endort, puis on les tatoue) les chinois, ils n’ont pas fait ça pour rien...
- Les enfants des écoles vont voir les cochons, (car là-bas on n’a pas encore coupé les budgets de l’art à l’école). Finalement je crois que je vais emmener mes petits-enfants voir la machine à merde, afin qu’ils ne prennent pas trop de retard en histoire de l’art.

De qui se moque-t-on ?
En dehors du discours intellectuel, l’artiste se veut pédagogue : « je me moque de l’art, je le fais sans le croire (sic) et je me moque de l’authenticité de l’artiste.» Il se moque aussi, dit-il, de la société de consommation, des grandes marques, et n’hésite pas à utiliser leurs logos en les ridiculisant, sans jamais être inquiété. Plus encore, il paraît que certains patrons de ces gros logos possèdent en leurs salons des œuvres de l’artiste. Et puis, si l’un d’entre eux trouvait un jour que le bouchon a été trop loin poussé, qu’à cela ne tienne, dit l’interviewé : « la prison, comme un musée est un podium ! » - Nous y voilà : Pourvu qu’on parle de moi….Je ne nommerai donc ni l’inventeur génial de cette machine, ni la dame pipi qui vend du papier Q à l’entrée et même des sachets d’excréments « tiens mon chéri, je t’ai rapporté un petit cadeau… » ni l’intervieweuse pâmée devant tant de beauté. « Vous rapprochez le public avec l’art !» lui dit-elle la bouche en cœur (oui, cela s’entend à la radio).

Le comble du comble
La production de ladite machine - des sacs d’excréments scellés - seraient cotée en Bourse ! Là, mon père doit se retourner dans ses cendres. À moins que nous n'ayons à faire à un marketincanular, rien d’étonnant à ce que l’économie mondiale soit constipée.

* le Conseil des Arts du Canada a subventionné une banane qui vole au-dessus du Texas – Il devrait s’appeler Conseil des arts contemporains car dès que l’on colle contemporain à l’art, on obtient souvent de la merde.

** Cloaca 5

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